Pour mieux comprendre l’impact du transport de marchandises sur la qualité de l’air dans la capitale, l’étude estime l’ampleur de la pollution (dioxyde d’azote NO₂ et particules PM₁₀) due aux poids lourds (PL) et aux véhicules utilitaires légers (VUL). Elle évalue ensuite les bénéfices sanitaires qu’aurait leur conversion en véhicules zéro émission moteur (Crit’Air E) et cyclologistique pour la santé des parisiens et parisiennes. L’impact environnemental est lui aussi estimé avec le calcul des tonnes d’équivalent CO₂ évitées.
Bien que moins nombreux dans le flux de véhicules circulant à Paris, les VUL et PL contribuent plus largement à la concentration de polluants atmosphériques que les voitures. Un VUL participe en moyenne trois fois plus à la concentration de NO₂ et deux fois plus pour les PM₁₀ qu’une voiture. Pour les PL, c’est huit fois plus pour le NO₂ et cinq fois plus pour les PM₁₀.
Dans le trafic global, les VUL et PL représentent à eux deux un peu moins de 20 % du trafic routier, mais ils contribuent à 43 % de la concentration en NO₂ et 40 % pour les PM₁₀. Il est donc indispensable de convertir ces véhicules, car leur remplacement a un impact significatif sur la réduction de la pollution de l’air liée au trafic routier.
En termes d’impact sanitaire, la modélisation effectuée évalue que la conversion de l’ensemble de ces véhicules en Crit’Air E permettrait d’éviter au moins 92 décès et 50 hospitalisations par an. Ce chiffre est très probablement plus élevé, puisque l’étude n’a pu travailler que sur les données des particules PM₁₀, sans prendre en compte les particules PM₂.₅ particulièrement nocives pour la santé.
Du point de vue environnemental, une telle conversion éviterait jusqu’à 500 000 tonnes de rejet d’équivalent CO2 par an, ce qui correspond à l’empreinte carbone moyenne de 55 000 français.
Tony Renucci, directeur de l’association Respire, déclare : “Après des années de combat nécessaires contre la pollution des voitures, il est temps d’accentuer nos efforts sur les gros pollueurs de la logistique qui roulent en poids lourds et camionnettes ! La ville de Paris, précurseur du combat contre la pollution de l’air dans le monde, doit maintenir ce leadership et s’attaquer à cette pollution, véritable source de nuisance et danger sanitaire pour la population !”
Dans sa stratégie ”La ville logistique 2022-2026”, la Ville de Paris affiche sa volonté de favoriser le report modal et l’usage de véhicules à zéro émission moteur pour la logistique. L’été 2024 et les Jeux Olympiques ont montré que pouvoirs publics et secteur privé pouvaient travailler ensemble pour trouver et mettre en place des solutions pour une logistique plus respectueuse de la qualité de l’air.
Afin d’améliorer la situation, Respire et Clean Cities appellent la ville de Paris à mettre en place une Zone de livraisons apaisée (ZLA) qui consiste en une zone zéro émission logistique, où la livraison se fait en véhicules électriques/hydrogène ou en cyclologistique, 7j/7 et 24h/24. Dans un premier temps, une fenêtre horaire de 4 à 11h30 du matin pourrait laisser opérer tous types de véhicules, puis des restrictions s’appliqueraient le reste de la journée sur le thermique. D’autres villes en France (Nantes, Bordeaux, Montpellier) ont déjà mis en place de telles mesures, démontrant qu’il est possible d’agir pour la santé des habitants de la capitale. Qui plus est, comme le montre une nouvelle étude de Clean Cities, parue le 3 octobre 2024, 35 villes européennes ont déjà adopté des plans pour mettre en place des zones de livraisons apaisées (dont Amsterdam, Bruxelles et Stockholm), et plus de 180 entreprises ont rejoint des partenariats avec les villes pour organiser la transition vers le zéro-émission moteur.
Pour rappel, dans un sondage Respire/Clean Cities/Opinion Way paru en juin 2024, 68 % des Parisiens pensent que les livraisons ont un impact négatif dans la ville et 81 % sont favorables à une solution de type zone de livraisons apaisée à Paris.
Jens Mueller, Directeur adjoint de la campagne européenne “Clean Cities”, commente : “Paris est devenu l’un des chefs de file européens en matière de mobilité urbaine durable, inspirant de nombreuses autres villes. Des avancées similaires sont possibles dans la logistique, si la capitale française suit l’exemple des nombreuses villes européennes qui commencent à mettre en place des zones de fret zéro émission. L’étude souligne qu’il faut agir maintenant pour préserver la santé des Parisiens et Parisiennes, et notre sondage réalisé plus tôt en 2024 montré qu’une large majorité d’entre eux soutient cette mesure !”
Ce travail de recherche a été mené entre septembre 2023 et août 2024 par des étudiants du Master of Science Sustainable Impact Analysis (SIA) de la Paris School of Economics et de l’École nationale des ponts et chaussées, sous la supervision de Martin Koning, directeur de recherches à l’Université Gustave Eiffel.
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