800 millions de particules par mètre-cube !
Respire a mené avec l’équipe de Jean-Baptiste Renard du Laboratoire de Physique et Chimie de l’Environnement et de l’Espace (LPCE2) du CNRS, une série de mesures dans les enceintes du métro et du RER pendant le mois de juin 2019. Ces mesures sont réalisées avec un appareil de haute précision, le LOAC, utilisé dans plusieurs dizaines publications scientifiques.
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Ces mesures sont encore préliminaires et nécessiteraient d’être étendues, reproduites, élargies. Toutefois, elles permettent de mettre en évidence toute une série de constatations majeures pour la situation de la pollution de l’air dans le métro.
Premières mesures de particules fines / ultrafines
Les données publiées par la RATP (réseau SQUALES – Surveillance de la Qualité de l’Air de l’Environnement Souterrain) ou par Airparif concernent les PM10 et les PM2.5 mais pas les particules plus petites. Les mesures du LOAC permettent pour la première fois de mesurer des particules de taille qui descendent jusque 0,2 micron (donc PM 0,2).
Or, le récent rapport de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES) rappelle que ce sont les particules les plus petites qui sont les plus dangereuses pour la santé humaine. Et il invite à les étudier sur elles. (1)
Notre étude est donc la première étude à mesurer les particules les plus fines dans les enceintes souterraines du métro et du RER. Celles qui menacent tout particulièrement la santé des usagers et des salariés.
Différence extérieur / intérieur
Dans certains cas, les concentrations de particules peuvent être dix fois plus élevées en intérieur qu’en extérieur (300 μg/m3 comparé à 30 μg/m3 pour les PM10). Ces différences sont assez classiques et ont déjà été mises en évidences par des études similaires.
Importance des microparticules
Dans nos mesures, la quasi totalité des particules est de taille inférieure à 1 micromètre. En nombre, plus de 99,5% des particules sont de taille inférieure ou égale à PM1.
La présence des plus petites particules n’est PAS proportionnelle à celle des particules de taille plus importante. Il peut exister des pics de petites particules qui ne sont pas visibles si on regarde uniquement les particules plus grosses (PM10 ou PM2.5)
Nombre de particules
Dans certaines mesures, la concentration de PM1 atteint 30 μg/m3, ce qui est considérable pour des molécules de cette taille et qui n’est jamais atteint en extérieur.
Mais les mesures en concentration ne rendent pas compte de l’importance de la pollution. Nos mesures montrent, sur le quai du RER A, dans la station de Gare de Lyon, entre 300 et 800 particules par cm3. Soit 300 et 800 millions de particules par m3.
Le nombre de molécules est plus important que la concentration.
Énorme variété des mesures
Les mesures montrent des différences importantes entre différentes parties du réseau. Les différences sont considérables entre l’avant, l’arrière et le milieu du quai ; entre des stations plus ou moins profondes ; entre les couloirs et les quais, etc. Et même entre différents trains sur un même quai.
Cela indique qu’il est nécessaire d’étudier en détail la distribution de la pollution dans les différentes parties d’une station : un seul point de mesure par station (comme avec le réseau SQUALES) est complètement insuffisant et pourrait nous faire manquer des enjeux importants.
Disposer d’un meilleur niveau de détail permettrait de diffuser des recommandations de santé publique pour les usagers. Par exemple : n’attendez pas votre RER près de l’entrée du tunnel !
Par ailleurs, les importantes variations observées au cours du temps sur le quai du RER nous indiquent qu’il existe des paramètres de variabilité qui nous échappent actuellement et qu’il importe d’étudier : la variabilité observée est-elle liée au type de matériel, au type de conduite ou encore à d’autres autre facteur restant à déterminer ? Comprendre finement ces différences permettrait d’aider la RATP et la SNCF a diminuer les concentrations de polluant dans les enceintes souterraines ou les tunnels et l’exposition des usagers et des personnels.
Finalement, la distribution fine, spatiale et temporelle, de la pollution de l’air dans les stations est donc largement inconnue. Des études précises s’imposent, pour mieux comprendre cette pollution, la diminuer, et pour mieux informer et protéger les usagers et les salariés.