Pourquoi est-il important que les enfants profitent des espaces publics extérieurs ?

Pourquoi est-il important que les enfants profitent des espaces publics extérieurs ?

LES BIENFAITS DE L’EXPOSITION DES ENFANTS AUX ESPACES NATURELS

La Charte nationale d’accueil du jeune enfant et la Convention Internationale des Droits de l’Enfant reconnaissent explicitement le droit des enfants à un contact régulier avec la nature. 

Cependant, un constat alarmant révèle que de nombreux enfants ne bénéficient pas de cette opportunité : selon un rapport de l’Institut de veille sanitaire (INVS) publié en 2015, quatre enfants âgés de 3 à 10 ans sur dix ne jouent jamais dehors en semaine, une tendance encore plus marquée chez les enfants vivant en milieu urbain, notamment en région parisienne.

 

1. Pourquoi les enfants restent-ils de plus en plus souvent en intérieur ?

Attrait des écrans :

L’avènement des écrans numériques a profondément modifié les modes de divertissement des enfants, les incitant à rester à l’intérieur plutôt que de sortir explorer leur environnement extérieur. Une enquête Ipsos révèle une augmentation significative du temps passé devant les écrans (en moyenne, 15 heures par semaine pour les 13-19, 6 heures pour les 7-12 ans et 4 heures pour les 1-6 ans).

Espaces verts insuffisants :

L’urbanisation croissante représente l’un des principaux obstacles à l’accès des enfants aux espaces naturels. En 2001, Paris comptait en moyenne 8,6 mètres carrés d’espaces verts par habitant, un chiffre qui est passé à 9,3 mètres carrés aujourd’hui. Si l’on exclut les bois de Vincennes et Boulogne, ce ratio tombe à seulement 3 mètres carrés, soulignant la rareté des espaces verts accessibles. En parallèle, les infrastructures urbaines conçues pour optimiser la circulation automobile laissent peu de place aux espaces de jeu en plein air. Cette urbanisation croissante et la circulation automobile limitent l’autonomie des enfants et les incite à rester à l’intérieur.

La notion du risque :

De nos jours, les parents sont de plus en plus réticents à laisser leurs enfants jouer à l’extérieur pour des questions de sécurité. Une enquête menée au Royaume-Uni révèle que 60% des parents sont préoccupés par la sécurité de leurs enfants lorsqu’ils jouent à l’extérieur (McNeish and Roberts, 1995). Or, en soustrayant l’enfant à toute fréquentation du danger en milieu naturel, on le prive d’une éducation à la prise de risque. Le manque d’exposition à l’environnement extérieur peut conduire à une diminution de la créativité, de la résilience mais aussi de l’autonomie.

Notre vision de la nature :

Les stéréotypes négatifs des adultes, par exemple le fait d’associer la terre et la boue à la saleté, peuvent dissuader de laisser les enfants jouer en extérieur. Dans l’ouvrage Comment élever un enfant sauvage en ville (Les Arènes, 2016), le biologiste canadien Scott Sampson explique qu’un changement de paradigme est nécessaire pour promouvoir une relation positive avec la nature dès le plus jeune âge.

2. Quelles sont les conséquences sur la santé des enfants ?

Le manque d’accès aux espaces extérieurs et à la nature s’accompagne d’une sédentarité croissante. L’ensemble a des conséquences néfastes sur la santé des enfants : 

– La sédentarité : des études ont montré que les enfants trop sédentaires sont plus susceptibles de souffrir de surpoids, de stress et de dépression. De plus, la myopie est plus fréquente chez les enfants ayant un manque d’exposition à la lumière naturelle.

– Le manque d’accès à la nature : les enfants vivant dans des environnements urbains sont plus susceptibles de développer des troubles inflammatoires tels que les allergies, l’asthme et le diabète de type 1. Cette tendance est attribuée à une faible interaction avec les microbes environnementaux, résultant de la perte de biodiversité et de la pollution en milieu urbain.

3. Quels sont les bienfaits du contact avec la nature ?

– Les impacts sanitaires directs : le contact avec les espaces naturels permet d’améliorer l’humeur et de réduire le stress, l’anxiété et les symptômes du trouble déficitaire de l’attention avec hyperactivité chez les enfants (Barton, Hugh & Thompson, Susan & Burgess, Sarah & Grant, Marcus. (2015). The Routledge handbook of planning for health and well-being: Shaping a sustainable and healthy future). Les recherches du biologiste suédois Patrik Grahn ont montré d’autres avantages d’un contact quotidien avec la nature sur les enfants : ils sont moins souvent malades, plus sociables et ont une meilleure concentration.

Les activités physiques en plein air contribuent également au développement des aptitudes sociales des enfants et favorisent le travail en équipe. Elles favorisent l’estime de soi, la motivation, la coopération, le développement moteur, l’autorégulation et la concentration.

– Les impacts sanitaires indirects, réduire la place de la voiture pour renaturer la ville : la répartition de l’espace public à Paris met en évidence une disproportion significative en faveur de l’automobile par rapport aux espaces verts et piétonniers. Ainsi, sur les 10 539 hectares que compte la ville, seuls 633 hectares sont dédiés aux espaces verts, ce qui représente moins de 6% de la superficie totale (sans y inclure les 1 840 ha des bois de Boulogne et de Vincennes). En revanche, près de la moitié de l’espace public, soit environ 1600 hectares, est réservée à la circulation automobile. Cette répartition déséquilibrée souligne l’importance de réévaluer l’allocation des ressources urbaines pour favoriser davantage la végétalisation urbaine et la création d’espaces dédiés aux piétons et aux activités des enfants.

Face à ce constat, plusieurs solutions en lien avec l’école existent, permettant aux enfants de passer plus de temps à l’extérieur :

1. Rues scolaires végétalisées :

L’intérêt d’une rue scolaire complètement piétonne est triple. Elle permet à la fois de sécuriser les entrées et sorties scolaires, d’améliorer la qualité de l’air dans les parages immédiats de l’école, mais aussi de transformer des zones auparavant circulées en espaces plantés (arbres, tapis végétalisés, etc)

2. Cours d'écoles végétalisées :

La transformation  des cours de récréation en espaces verts et accueillants offre aux enfants un environnement propice au jeu et à l’exploration en plein air.

3. Classe dehors :

Le fait de sortir de la salle de classe pour enseigner en plein air offre aux enfants une expérience éducative stimulante et favorise leur connexion avec la nature. Par exemple, à Paris, deux enseignantes délocalisent chaque jeudi leurs cours dans un jardin. Des collectifs et réseaux existants témoignent de l’intérêt de cette pratique et agissent à différents niveaux pour la promouvoir.   

En conclusion, reconnaître et garantir le droit des enfants à un contact régulier avec la nature est essentiel pour leur bien-être physique, émotionnel et cognitif. En mettant en œuvre des solutions concrètes et en favorisant une culture favorable à la nature, nous pouvons offrir aux générations futures un environnement propice à leur épanouissement.

L’enfant devait grandir au grand air car “c’est la nature qui se charge de l’enseignement”

Jean-Jacques Rousseau