Qu’est-ce qu’un îlot de chaleur urbain ?
Un îlot de chaleur urbain (ICU) est un phénomène où les températures dans les zones urbaines sont significativement plus élevées que dans les zones rurales environnantes. Ce microclimat urbain est caractérisé par un dôme thermique qui se forme au-dessus des villes, augmentant la température à mesure que l’on se rapproche du centre-ville. À Paris, par exemple, cet effet peut augmenter la température moyenne nocturne de 8°C par rapport à la campagne environnante.
Les causes des îlots de chaleur urbains
Le changement climatique
Le changement climatique contribue à l’augmentation globale des températures, ce qui accentue le phénomène des îlots de chaleur urbains. En France, on prévoit que d’ici 2050, les vagues de chaleur seront deux fois plus fréquentes qu’aujourd’hui (Source: Plan de gestion des vagues de chaleur, DICOM 23109).
L'artificialisation des sols
Les zones urbaines sont souvent très minéralisées et denses, comme c’est le cas à Paris. En Île-de-France, environ 270 000 hectares de surfaces urbanisées et 5 840 000 habitants vivent dans un îlot de chaleur, que ce soit dans des zones commerciales, des locaux d’entreprises ou des quartiers résidentiels.
Les matériaux des infrastructures urbaines
Les surfaces urbaines, telles que les parkings, les routes et les trottoirs, sont souvent composées de matériaux comme l’asphalte et le béton, qui absorbent et stockent la chaleur pendant la journée pour la libérer la nuit. Par exemple, un enrobé bitumineux exposé au soleil peut atteindre une température de surface de plus de 60°C, alors qu’un granit clair ne dépasse généralement pas les 40°C dans les mêmes conditions.
La morphologie urbaine
La structure des villes influence également les îlots de chaleur. Contrairement à l’idée que des rues larges facilitent la circulation de l’air, des études montrent que des rues sinueuses et des ruelles étroites permettent un rafraîchissement plus rapide de l’air. Les cœurs de ville sans organisation géométrique stricte maîtrisent mieux les vagues de chaleur.
Les émissions de chaleur d'origine anthropique
Les activités humaines, telles que l’industrie, les transports et la climatisation, produisent également de la chaleur qui s’ajoute à la température ambiante. Cela est particulièrement vrai dans les grandes villes où la densité de population et d’activités est élevée.
L’impact des îlots de chaleur sur la qualité de l’air
Les conditions météorologiques favorables aux îlots de chaleur, comme des températures élevées, un vent faible, une faible humidité et un ciel clair, contribuent également à la pollution atmosphérique. Les polluants se dispersent moins facilement et s’accumulent dans l’atmosphère, ce qui peut augmenter les niveaux d’ozone (O3), un polluant secondaire et un gaz à effet de serre (Yoshikado et Tsuchida, 1996). À Saint-Étienne, par exemple, des pics de pollution en ozone, dioxyde de soufre (SO2) et dioxyde d’azote (NO2) ont été observés pendant des périodes anticycloniques (Batton-Hubert et al., 1997). La présence simultanée d’un ICU de forte intensité et d’un pic de pollution peut avoir des impacts sanitaires significatifs (Escourrou, 1999).
Les conséquences sanitaires des îlots de chaleur
Les groupes vulnérables, comme les enfants de moins de 5 ans, les personnes de plus de 65 ans et celles atteintes de maladies chroniques, sont particulièrement à risque. Les symptômes incluent le stress, l’augmentation du rythme cardiaque, la déshydratation, les éruptions cutanées, la réduction de l’attention, les malaises, et dans les cas extrêmes, les coups de chaleur et la perte de conscience. En Ontario, chaque degré au-dessus de 22°C a augmenté de 75% le nombre d’admissions à l’urgence pour des maladies liées à la chaleur entre 2004 et 2010 (Fortune et al., 2014).
L’impact de la chaleur sur les enfants
Les enfants sont particulièrement vulnérables aux effets du changement climatique et des vagues de chaleur. Une étude de 2021 publiée dans Science montre que les enfants de moins de 10 ans en 2020 seront exposés quatre fois plus souvent à des événements extrêmes si le réchauffement climatique est limité à 1,5°C (Thierry et al., 2021). Les jeunes enfants et les fœtus sont particulièrement à risque, avec une mortalité infantile liée à la chaleur jusqu’à 100 fois supérieure à celle des adultes dans les pays développés (Zivin et Shrader, 2016).
Les températures élevées peuvent également affecter les fonctions cognitives des jeunes adultes, notamment
en milieu scolaire. Une étude de l’université de Harvard a montré que des températures intérieures élevées peuvent réduire les capacités c
ognitives des étudiants, affectant leur performance académique (Goodman et al., 2018). Une augmentation de la température ambiante de 22°C à 32°C peut réduire les chances de réussite à un examen de 11%. Les effets combinés de la chaleur, de l’humidité et de la pollution peuvent également aggraver les maladies chroniques comme l’asthme.
Solutions pour atténuer les îlots de chaleur urbains
Exemples concrets d’aménagements urbains
À Paris, la rue de la cour des noues, dans le 20ème arrondissement, a été piétonnisée : un asphalte clair a été posé pour réduire la température de surface. Les places de stationnement ont été remplacées par des bandes végétalisées, et des bancs ont été installés. Cette rue aux écoles se trouve près d’une placette végétalisée avec des arbres et un point d’eau au milieu. Ces aménagements montrent comment des actions locales peuvent avoir un impact significatif sur la réduction des îlots de chaleur urbains.
Rue la cour des noues, 20ème arrondissement ©Respire
Placette avec un point d’eau. Rue la cour des noues, 20ème arrondissement ©Respire
Conclusion
Réduire les îlots de chaleur urbains nécessite des actions à la fois individuelles et collectives, ainsi que des politiques publiques globales. La végétalisation, l’utilisation de matériaux réfléchissants, et la promotion de modes de transport durables sont autant de mesures qui peuvent aider à atténuer ce phénomène et améliorer la qualité de vie en milieu urbain. Les initiatives de création de rues scolaires, comme les “Rues aux Écoles” montrent que des changements concrets et localisés peuvent avoir des impacts positifs significatifs sur notre environnement et notre santé.